Bilan de la 2e semaine

Suite à l’arrêt prématuré du Te Araroa, il a fallu rebondir. Plus facile à dire qu’à faire. Comment passer d’un projet tout tracé à la création d’un itinéraire.

Comment passer du mode randonneurs à celui de vacanciers ? Et qu’est-ce qui nous donne envie ? Tant d’opportunités sans qu’aucunes ne répondent vraiment à mes désirs, mes attentes, mes envies…

Comment ne pas se sentir comblée alors qu’une foule de possibilités s’offrent à moi ? Je me sens totalement perdue.

Tancrède souhaite remonter à Christchurch pour trouver plus facilement du travail. Pour ma part, c’est plus confus, je suis donc. Et qui sait peut-être que les opportunités naîtront de ce choix.

Après 550km de stop, plusieurs chauffeurs et de nombreuses conversations nous y sommes.

Mais la Nouvelle-Zélande sans moyens de transport c’est un peu frustrant car les paysages sont hors des villes. Il nous faut donc devenir plus autonome pour nous sentir plus libre. Par chance un couple de français vendait son van équipé. Nous achetons donc le lendemain du Waitangi Day, Arnold, notre fidèle destrier pour les prochains mois.

Arnold est un Nissan Caravan de 1991. Pas tout jeune, mais il est confortable, n’a pas trop de kilomètres et se porte comme un charme. Roulez jeunesse ! Nous décollons vers de nouvelles aventures.

Nous partons vers le Nord de l’île du Sud, il faut bien commencer par quelque part… Quelques randonnées très connues s’y trouvent et les vendanges ne vont pas tarder à commencer, donc c’est parfait pour nous deux.

Premier stop à Kaikoura où nous découvrons le bleu de l’océan… Et Tancrède réussi enfin à ouvrir un compte bancaire. Les démarches sont presque finies pour pouvoir travailler, il ne nous manque plus qu’un numéro fiscal et nous sommes bon ! Suite à notre première nuit dans notre van, à Kaikoura, nous attaquons notre première petite rando depuis l’échec du TA. Ça fait du bien de se dégourdir les jambes. Et nous voyons nos premiers phoques, ça c’est trop trop chouette.

Puis nous repartons vers Bleiheim. Nous y faisons notre seconde randonnée au milieu de pas grand chose, mais les montagnes au loin étaient extraordinaires. En continuant vers Haverlock, nous nous arrêtons au Cullen Point ; que la vue est belle après une toute petite montée. En cherchant un endroit où dormir, nous découvrons le Pelorus Bridge. Nous en profitons pour nous baigner, quelle magnifique fin de journée…

Maintenant nous sommes dans un nouveau mood, bien plus positif et optimiste. Nous cherchons toujours nos marques, mais ça va beaucoup mieux, pas d’inquiétudes. En espérant que les prochaines semaines nous donnent à voir tout plein de petites merveilles et de belles randonnées. En attendant, on vous embrasse.

Bilan de la 1e semaine

Ce n’est pas glorieux. Faire un bilan après une semaine de marche en ayant le cœur si lourd, c’est dur, je dois bien l’avouer.

Nous sommes partis de Bluff, comme convenu. Ces 35 premiers kilomètres ont été vraiment dur.s Les sacs étaient très lourds et le chemin des plus long pour un premier jour. Arrivés à Invercargill, je compte déjà 2 ampoules (c’est l’histoire de ma vie lorsque je marche). Nous prenons le temps de faire nos papiers pour la banque, de récupérer mes chaussures que j’attendais depuis 4 jours déjà et de faire quelques modifications dans nos plannings et dans nos sacs, ce jour de repos nous permet de repartir « frais » vers Riverton.

De nouveau 35km, dont 25km sur la plage. Moins éreintante que la première étape, ça reste dur physiquement et Tancrède se fait mal sur les derniers kilomètres. Mon tendon d’Achille est extrêmement douloureux, mais je me dis que demain ça ira mieux. On se couche donc le cœur lourd en se demandant ce que le lendemain nous réserve.

À mon grand désarroi, Tancrède ne peut vraiment plus marcher, sa décision est prise, il veut partir de cette ville qui représente un échec et bosser dans le Nord de l’île. Pour moi c’est un peu plus compliqué. Un ami me dit que ma douleur doit être prise au sérieux, car ça peut entraîner la rupture du ligament, mais je me sens apte à continuer.

Nous décidons de prendre une journée de plus pour y réfléchir. Mais nous retournons à Invercargill pour ne pas agir dans la précipitation. Ce n’est pas trop loin du chemin, mais suffisamment éloigné pour que Tancrède puisse rentrer à Christchurch.

Mais je ne peux rentrer trop vite, je lui propose donc de faire du stop. Par chance, une dame nous prend en quelques minutes et nous dépose au centre ville de Christchurch. Nous y rencontrons un français venant de terminer le TA, on en parle longuement. Je sens que je veux le faire, je ressens que je dois le faire. Mais plus dans ces conditions, plus maintenant, pas comme cela. J’ai trop précipité les choses, j’ai voulu aller trop vite, sans prendre en considération Tancrède ses faiblesses, la réalité du terrain… Je me sens triste mais surtout idiote de m’être lancée ainsi. Je me sentais prête mais nous étions deux, je me sentais confiante car j’avais fait St Jacques mais c’est le TA.

Le retour de manivelle est un peu violent, mais c’est en tombant qu’on apprend et qu’on se relève. Alors avançons… Lais pas tout de suite sur le TA. J’étais prête à marcher à deux, j’étais prête à faire des concessions et maintenant, il faut repartir seule ? Je ne suis pas dans le bon mood, je ne suis plus convenablement équipée…

Je dois d’abord me ressaisir, reprendre confiance en moi, croire en mes capacités et repartir. Peut-être en octobre ? Dans le « bon » sens ?

Maintenant, il faut faire le deuil de cette aventure ; je me sens vide, je me sens triste et incapable de prendre la bonne décision. Mais la marche ne cesse de m’animer. Si ça ne peut être sur le TA dans l’immédiat, alors je marcherai pour découvrir l’île d’une autre façon. Et comme le destin est bien fait, je rencontre un Tchèque qui a marché 3 mois sur les deux îles en se faisant son propre road trip. Ça m’inspire, je dois me relancer et chercher à rebondir de cette façon. Ce n’est pas sur le TA (pour le moment), ça me blesse, mais c’est le destin et c’est toujours mieux de ne pas le forcer (on voit ce que ça donne quand on ne va pas dans son sens, ou trop vite, ou trop loin…).

Lève-toi et marche !

Je repars donc pour de nouvelles aventures. En apprenant sans cesse de la vie.

J’ai précipité les choses, je précipite toujours tout. Ça m’a joué plusieurs fois des tours et je n’ai pas appris de mes erreurs. Pensant revenir comme neuve de St Jacques je ne me suis pas plus remise en question que ça à propos de la vitesse à laquelle je repartais. C’est maintenant chose faite ! Vais-je enfin me sevrer de toute cette précipitation qui m’envahit régulièrement ?

Pas gagné tout ça

Je dois avouer que de gros doutes m’animent depuis l’arrêt du TA. Mais c’est le destin. Maintenant que la décision est prise, il faut continuer à avancer. Et la destinée fait toujours bien les choses. Depuis 3 jours c’est le déluge et aucun randonneur ne peut marcher sur le TA. Il risque d’être bloqué pendant un certain temps. Donc ce n’était juste pas mon moment, c’est tout.

Pour être tout à fait franche, rebondir est plus compliqué que prévu. Repasser en mode Backpackers, créer un itinéraire de tourisme, se reprendre en main… Moi qui ressentais le besoin et l’envie de découvrir autrement cette île. Serait-ce par le travail et les rando ? Par l’acquisition d’un van pour être plus libre ? Seul l’avenir nous le dira. Mais quoi qu’il en soit, changer ses plans, sortir de ses propres sentiers battus n’est pas chose aisée. Mais ça ne peut être que positif pour la suite.

Alors Hop !

L’arrivée et la préparation

Cette première semaine a été sacrément dense en rebondissements.

Jusqu’à la dernière minute, il nous a fallu acheter du matériel pour partir au top. Le sac est fait. Et il pèse moins de 10 kg ! BINGO !!!!

Mais les ennuis commencent !

À 2h du départ, je casse mon téléphone, il me faut donc en changer. Manque de peau, j’étais passée en Esim la veille pour pouvoir avoir une carte SIM néo-zélandaise à mon arrivée… Ça va me poser un sacré paquet de soucis par la suite !

Me voilà donc chez la marque à la pomme pour récupérer un nouveau téléphone. Dans la foulée, le vendeur me dit qu’il n’y a aucun souci, que je peux supprimer ma Esim. Je l’écoute naïvement, ne le faite jamais, transférez votre Esim sur votre nouvel appareil avant de la supprimer.

Le début des ennuis est donc encré ! Cette suppression bloquera pour 4 jours mon téléphone, mes boîtes mails, mes comptes sur les réseaux sociaux etc… Je vous passe les détails, mais c’est la galère.

Comme si ce n’était pas suffisant, à l’aéroport, on se rend compte que mon Visa n’est pas bon. Lors de la démarche d’obtention, j’ai confondu un « i » en « 1 »… Le stress monte d’un second cran quand je me vois bloquée en France pour régler le souci. Par chance, je passe. Sans vraie certitude de pouvoir vraiment rallier le pays des kiwis… Mais chaque chose en son temps.

Après nos premières six heures de vol nous voilà à Abu Dhabi, toutes nos tentatives de déblocage de téléphone ratent. Nous voilà repartis pour 13h d’avion. 5 films, beaucoup trop de nourriture et quelques heures de sommeil plus tard, nous voilà à Sydney. Nos nouvelles tentatives de communication pour mon téléphone sont un échec. Et la compagnie me valide que mon visa est accepté après de nombreuses minutes au téléphone avec la douane néo-zélandaise. Premier bon point de la semaine…

Les quatre dernières heures d’avion sont donc moins tendues même si je n’ai toujours pas de téléphone. Je vous passe les détails, mais il faudra un jour de plus et une maman hors du commun qui ira chez Orange pour débloquer mon téléphone.

Bien que ce soit violent émotionnellement depuis 3 jours, de nombreux points positifs sont présents. Tout d’abord la gentillesse des gens bien entendu, la patience de Tancrède, l’abnégation de ma maman magique, l’arrivée dans ce pays magnifique qui est la Nouvelle-Zélande et le soutien de mes proches.

Nous avons la chance de découvrir Christchurch sous le soleil. Cette ville a subi un tremblement de terre en 2011. Elle s’en relève avec brio bien que 185 personnes y aient perdu la vie et que 80% du centre ville soit voué à la démolition.

Les habitants de la seconde ville de NZ ont pris le parti de ne pas construire d’immeubles trop hauts, de laisser aérée cette ville et de la lier à de nombreux parcs. En évolution permanente, cette ville est vivante, dynamique et envoûtante. Quelle belle surprise.


Nous finirons la semaine en passant 2 jours à Hamilton pour voir mon amie Lina jouer avec l’équipe de France de rugby à 7. C’est un tout autre univers que le rugby à 15. Je vous le conseille. L’ambiance rugby et celle des festivals de musique est vraiment très chouette. Surtout pour finir cette semaine de galères, de décalage horaire (+12h mine de rien) et de découvertes.


Pour bien terminer cette introduction au TA, nous manquons notre avion d’Hamilton à Invercargill. Un problème de navette non lié à nous (pour une fois). Sacré démarrage de cette aventure. Mais nous ne baissons pas les bras, nous continuons d’avancer vers ce projet fou de traverser la Nouvelle-Zélande à pied !


À quelques jours du départ, il est temps de s’attaquer à l’organisation à proprement parlée du TE ARAROA ! Où allons-nous dormir ? Qu’allons-nous manger ? Comment allons-nous acheter à manger ? À quelle fréquence ? Comment allons-nous gérer les kilomètres à faire par jour ? Les rivières à traverser ? Le dénivelé à gravir puis redescendre ?

Beaucoup de questions se posent et il faut beaucoup de temps pour essayer d’y répondre… J’espère que les prochains bilans permettront de répondre à tout cela. En attendant, nous tentons d’y répondre du mieux que nous pouvons afin de nous rassurer. Et d’avoir l’impression d’être prêt. Bien que je sois certaine que nous ne sommes jamais vraiment prêt pour ce genre d’expédition.

Pour être franche, il me manque toujours mes sandales pour marcher dans les rivières et nous n’avons toujours pas de compte bancaire néo-zélandais… J’aurai bien dormi 2 jours de plus pour récupérer du décalage horaire. Mais à force d’attendre, on va se perdre. Alors on se lance ! On se coupe les ongles, on se lave les cheveux, on profite d’une douche chaude et d’un lit pour la dernière fois et on fonce ! À nous le TE ARAROA !

Et enfin le départ !!!!!

Le matériel pour cheminer sur le TE ARAROA

Après quelques lectures, un paquet de recherches et de nombreuses discussions, me voilà au moment fatidique de faire mon sac.

Le challenge est de partir avec moins de 10 kg, y compris eau et nourriture. Il faut penser qu’à certains moments, je devrais porter jusqu’à 10 jours de nourriture… Ça va rajouter pas mal de poids.

Alors je me lance. Entre la tente, le matelas, le sac de couchage, de quoi cuisiner et les fringues ; on pourrait penser que c’est impossible. Et pourtant… Je dois être à un peu plus de 6,5 kg sans eau, ni nourriture !

Je vous propose de découvrir le contenu de ce dernier en vidéo.

Pour le détails :

NB : La première version de mon sac était bien plus lourde et bien plus fournie (9 kg sur le tapis de l’aéroport, mais sans tente, réchaud, sandales, nourriture, eau…). Bref, il manquait vraiment beaucoup de choses primordiales.

La première journée de marche sur le TA a eu raison de beaucoup d’objets qui sont retournés illico en France.

J’ai pris le parti d’alléger considérablement mon sac car, pour moi c’est bien plus agréable d’être libre de ses mouvements avec un sac le plus léger possible. Qu’encombré d’objets qui sont là « au cas où ».

J’espère que ce détail vous aidera pour vos prochains sacs et expéditions.

Je ferais un résumé des objets vraiment utiles, inutiles et/ou rajoutés après le TE ARAROA. En attendant, je pense fort à vous.

À moi les plages, les plaines et les montagnes néo-zélandaises.

Le TE ARAROA

Et voilà, un nouveau projet en cours. Le TE ARAROA en Nouvelle-Zélande. Un chemin qui a vu le jour en 2011, TE ARAROA signifie « le long chemin » en maori, je sais à quoi m’en tenir maintenant.

Environ 1000 randonneurs s’y attaquent chaque année et seulement la moitié le fini d’une traite. On y traverse les deux îles principales, de magnifiques paysages aussi variés qu’à couper le souffle et on y découvre nos limites…

Un sacré challenge qui m’attend. D’autant plus que je vais dormir sous tente, avec une autonomie en nourriture qui sera bien plus importante que sur St Jacques et un dénivelé jamais rencontré jusqu’alors.

Le TE ARAROA nous donne la chance de faire 3000 km du Sud au Nord des deux îles néo-zélandaises. Dans ce sens, qui est le moins répandu, on l’appelle le NOBO. Sinon les hikers l’appellent le SOBO, lorsque qu’il est réalisé du Sud au Nord.

Le grand changement par rapport à St Jacques, c’est que nous sommes deux.

En effet, mon mari, Tancrède s’est proposé de m’accompagner. Nous partons donc, à deux, affronter la pluie et les montagnes du pays du long nuage blanc.

Le tracé du Te Araroa

Je me propose (à mon tour) de partager avec vous mes doutes, mes questionnements, mes appréhensions et quelques photos évidemment.

À tout bientôt pour les bilans hebdomadaires bien évidemment.

Le retour

Après 2100 km de plénitude… Le retour n’est pas des plus simple soyons franc. Je pensais pourtant que les premiers jours seraient les plus compliqués. Ce n’est pas du tout le cas, je n’ai pas eu de mal à revenir chez moi, à recommencer à évoluer dans mon habitat « naturel »… C’est l’acclimatation qui prend du temps.

Bien que la tête soit remplie de projet, la réalité est beaucoup moins simple dans la « vraie » vie que sur le Camino.

Tout ce que nous souhaitions laisser derrière nous nous rattrape, il faut apprendre à composer avec. C’est peut-être le plus compliqué.

Les semaines ont passé et je me rends compte qu’il est difficile d’être aussi calme et réfléchir que sur le chemin. Les petits tracas de la vie quotidienne, le rythme effréné, les obligations… La vie quoi ! Il faut un certain temps pour conjuguer vie « normale » et expérience du chemin de St Jacques de Compostelle.

Je ne peux pas vous dire si j’ai réussi, mais je ne pense pas sincèrement.

Moi qui pensais m’arrêter à Conques, puis à Cahors, St Jean Pied de Port, Burgos, Leòn… Je l’ai fait, je suis allé au-delà de St Jacques de Compostelle…. Alors croyez en vous et faites le !

Pour vous donner envie ; les résumés en vidéo de ces 2100 km.

Pour finir sur cette expérience, c’est avec beaucoup de bonheur que je vous présente mes petits « diplômes » du chemin.

Cap Finisterre – Le bout du monde !

Si je résume, j’ai fait 2000 km à pied, ça fait 1 mois que je marche sous la pluie, que j’ai froid et que je peine à sécher. Les nerfs sont donc légèrement à vif et la fatigue se fait ressentir. Je passe les détails des multiples douleurs.

J’ai vécu de grosses émotions lors de mon arrivée à Santiago et l’arrivée à Cap Finisterre n’était pas, pour moi, le point le plus important du voyage. Je souhaitais d’ailleurs continuer jusqu’à Muxia pour avoir « tout » fait.

JE ME TROMPAIS !!!

Je reviens à cette journée du 26.11.19. Nous marchons toute la journée la boule au ventre, car la météo annonce une tempête qui va être terrible. Le brouillard, la pluie et le vent nous accompagnent, mais pas plus difficilement que d’habitude.

J’arrive donc vers 16h30, sac sur le dos, au « bout du monde ». Cet endroit se trouve à 3,5 km après la ville de Finisterre. Un vent à 170km/h nous secoue et d’énormes nuages gris menacent. Nous sommes à la borne 0,000 km. C’est la fin ! Je me balade, prends des photos, profite de la vue tout en prenant garde à cet énoooooorme nuage noir qui se rapproche de nous. On prend certains automatismes lorsque l’on marche sous la flotte pendant des semaines. Et franchement, je n’avais pas envie d’être mouillée. Mais Toni est rassurant (et il avait raison). Ce satané vent, qui me fera souvent vaciller pousse les nuages à quelques kilomètres de nous. Et la magie du lieu opéra…

… Rassurée, je déstresse un peu et je découvre un petit bout de ciel bleu. Hormis à Santiago, le ciel bleu avait disparu des couleurs que je côtoyais visuellement ces derniers temps. Premier sourire dessiné sur mon visage.

Puis je tourne la tête et le soleil nous fait le plaisir de se présenter à nous. Comment décrire l’emballement de mon petit coeur et le gigantesque rictus inscrit sur mon petit minois ?

Cette journée finit en apothéose.

Assise sur mon rocher, face à un vent des plus violent, contemplant une vue extraordinaire ; consciente de la fin de mon aventure, je fonds en larmes. Cette émotion est loin de celle ressentie à Santiago. Elle est profonde, elle est encrée, elle est douce et belle. Je ne suis plus vide de sens, je me suis trouvée, je suis là où je dois être et je le sais. Cet endroit est MA fin.

Après avoir vagabondé, pleuré, photographié, humé les embruns et profité du soleil ; je me dirige vers le bar du phare histoire de me réchauffer. J’y croise Matthieu, un pèlerin croisé plusieurs fois sur le chemin. Ce jeune suisse de 18 ans à fait le chemin de Genève. Il ressemble comme deux gouttes d’eau à mon petit frère, Simon. Et sa présence, à ce moment-là, à cet endroit-là, suite à toutes nos péripéties respectives me fait un électrochoc. Je me mets à courir vers lui et je m’effondre dans ses bras. Nous restons ainsi quelques secondes, profitant de la présence de l’autre. Comment est-il possible que nous nous retrouvions ici ? Pourquoi le chemin nous a donné la chance de nous croiser à multiples reprises ? Je suis si redevable à mon Karma à cet instant précis…

Nous regardons, de nos promontoires respectifs, un merveilleux coucher de soleil. Le plus beau de toute ma vie. Simple, doux, frais, mais remplit d’une émotion sans précédent, d’une expérience hors du commun et de sentiments exacerbés.

Puis nous rentrons à la nuit. C’est la première fois que je marche de nuit ; je m’étais toujours débrouillée pour arriver de jour, car ça m’est beaucoup plus confortable. Mais ce retour représentait beaucoup. C’était la première fois que je marchais sur mes propres pas, je revenais à pied à un endroit où j’étais déjà passée. Ces 3 km sonnaient très clairement le glas de la fin de mon aventure. Mais comment aurais-je pu mieux terminer cette aventure qu’ainsi ? Nombreux sont les pèlerins arrivant à Cap Finisterre sous la pluie ou le brouillard, nombreux sont ceux qui ne peuvent profiter d’un coucher de soleil. Et moi, j’ai eu cette chance, ces chances. MERCI !

J’ai donc atteint le « bout du monde », j’y ai découvert la plénitude, je me félicite d’avoir réussi (aussi difficile cela ait été) et de savoir en profiter.

Bilan de la dixième semaine

En cette dernière semaine de marche, je me sens tout particulièrement soutenue par mes proches. Je communique peu avec eux, un message de temps à autre ; mais ils sont tout proche lorsque le moral baisse ou que les doutes s’installent. Comment les remercier pour cette bienveillance et cet amour qu’ils m’offrent un peu plus chaque jour ?

Quel drôle de sentiment de revenir sur le Camino Francès après deux semaines de vagabondage sur le Camino del Norte. Je reprends la route délaissée il y a 12 jours exactement, pour rallier définitivement Santiago. Comme une impression de retourner à la maison. C’est étonnant quand on sait que je n’ai aucune idée de ce qui m’attend en réalité sur ce chemin…

Plus les kilomètres passent et plus l’envie de réfléchir à « l’après » pointe le bout de son nez. Mais je m’efforce de profiter de chaque seconde sur ce chemin, car il va me manquer ; je le sais, je le sens…

Je continue cependant de laisser mon esprit divaguer, analyser, réfléchir…

C’est décidé, ce corps que je martyrise, que je dénigre souvent, à qui j’impose 30 à 40 km par jour ; je dois l’assumer, le bénir, l’aimer ! Comment se fait-il que des images de femmes minces, martelées durant des années soit toujours autant encrées dans mon inconscient ? Encore un beau challenge et de nombreux questionnements à venir.

Nous sommes dans un bilan, je m’épancherai donc sur mon arrivée et mon séjour à Santiago -> ICI.

Mais quoi qu’il en soi ce fut magique. C’est donc les yeux remplis d’étoiles, une nouvelle épaisseur de vêtements sur le dos et le coeur tout bizarre que je repars de Santiago de Compostelle pour rejoindre Finisterre puis Muxia. Je rajoute environ 100-120 km de plus à mon périple. Mais ils sont nécessaires pour faire un trait d’union entre l’expérience vécue et la « vraie » vie.

Ces 3 jours se déroulent gentiment sous la pluie galicienne, mais je commence à être habituée même si ce n’est pas le temps le plus sympa pour marcher. Je rencontre un homme sur le chemin avec une guitare, c’est le second et j’avoue que ça me donne envie de m’y remettre. Vais-je tenir cette résolution ? Je l’espère sincèrement.

Je me rends compte que je n’ai jamais trop laissé de place aux loisirs dans mon ancienne vie et il faut y remédier. Lire plus, jouer de la guitare, se balader ; profiter et non optimiser sa vie en permanence. Les loisirs permettent de renouer avec soi, il ne faut pas les négliger. Que d’évolutions !

La dernière journée de notre périple aurait dû être à Muxia, mais le chemin en a choisi autrement. Cette journée débute sous un brouillard à couper au couteau et sous un vent des plus violent. Nous avançons non sans mal, mais le but est si proche que ce sont nos tripes qui nous permettent de mettre un pied devant l’autre. Puis nous croisons la pluie. Lorsque celle-ci se calme, le vent prend très clairement le relais et nous arrivons trempés et frigorifiés à Cap Finisterre.

Là encore, nous sommes dans un bilan, je vous propose de découvrir ce moment hors du commun -> ICI.

Mais je ne peux cacher que ce moment fut fort, hors du temps, du commun et de mes attentes. Terminer 2000 km de marche par une telle expérience est une chance que je ne saurais expliquer, mais je serais redevable à ma destinée toute ma vie pour cela.

Le chemin, tu ne sais pas ce que tu vas y trouver, mais les réponses y sont cachées. En réalité, elles sont cachées en toi, mais tu ne prends pas le temps d’y réfléchir dans la « vraie vie ». Alors fais toi confiance ! Et avance !

Les dodos :

  • Le 18.11 – Laguna / Albergue Lagoa (12€) – Belle installation, possibilité de cuisiner, accueil charmant, bar, épicerie.
  • Le 19.11 – Sobrado dos Monxes / Albergue municipale (8€) – Dortoirs très grands, dans monastère, magnifique mais froid, possibilité de cuisiner.
  • Le 20.11 – A calle de Ferreiros / Albergue a Ponte de Ferreiros (13€) – Dortoirs neufs, installations récentes, très agréable, pas possibilité de cuisiner, possibilité de manger sur place, bar.
  • Le 21.11 – Santiago / Hotel Alda Algalia (15€) – Hotel charmant, dans centre ville.
  • Le 22.11 – Santiago / Hotel Alda Algalia (15€) – Hotel charmant, dans centre ville.
  • Le 23.11 – Santiago / PR 25 Julio (17€) – Très bel hôtel, emplacement proche cathédrale, accueil agréable.
  • Le 24.11 – A Pena / Albergue Alto da Pena (12€) – Installations relativement propres, on y a eu très froid, accueil très limite, pas possibilité de cuisiner, mais bon repas proposé sur place, bar.
  • Le 25.11 – O Logoso / Albergue O Logoso (12€) – Bel endroit, des travaux d’agrandissements en cours, accueil très agréable, possibilité de cuisiner ou de manger sur place, bar.
  • Le 26.11 – Finisterre / Albergue Sonia (12€) – Magnifique, diner en donativo, propre, neuve, accueillante… Une belle fin de parcours !

Santiago de Compostella

Il m’est compliqué de résumer cette expérience, je vais pourtant essayer.

L’arrivée à Santiago de Compostelle se passe sous la pluie. À l’entrée de cette très grosse agglomération, peu de sentiments s’invitent. Je prends quelques photos avec le nom de cette ville si attendue. Je suis surprise de ne rien ressentir de particulier alors que j’en rêvais, de cette arrivée, de cette ville. Plus j’y réfléchis et plus je me dis qu’il était là mon but. Et j’en suis déçue. Mais continuons d’avancer, le chemin est plein de surprises…

Nous traversons la ville nouvelle, pas moins de 3 km… Sans nous retourner, nous survolons le centre-ville historique avant de rejoindre la place de la cathédrale. Toujours nos sacs sur le dos, nous avançons les yeux rivés sur la signalisation au sol pour nous repérer.

Dès que je mets un pied sur cette place, dès que je fais face à cette cathédrale magnifique, je fonds. Je reste, bouche-bée, sous la pluie, à regarder cet édifice. Je laisse les émotions m’envahir, les larmes se faire un chemin au coin de mes yeux puis sur mes joues. Cet état est agréable.

Je suis incapable, encore maintenant, d’expliquer ce qui m’a traversé. Je me suis sentie remplie de gratitude, de joie, de bonheur et pourtant si vide. L’incompréhension et le soulagement faisaient parti de tout cela. Quel drôle de mélange.

C’était déroutant, étonnant mais apaisant. Je ne sais pas combien de temps je suis restée là, à regarder cette création architecturale tant convoitée… Le temps était comme arrêté, comme figé. J’étais seule en présence de cette cathédrale, je ne voyais pas les personnes se prendre en photo avec la si courtisée place. Il n’y avait que moi.

Quel étonnant moment. Je m’en souviendrais toute ma vie, j’en suis certaine. De l’écrire, les émotions naissent de nouveau, moins intensément certes, mais je suis tout de même bouleversée. Quelle expérience hors du commun.

Je ne peux prétendre réussir à partager cette joie avec vous, mais j’espère que j’aurai réussi à vous donner une petite idée de tout ce qui peut se passer dans la petite tête d’une pèlerine au moment où elle rejoint le point d’arrivée d’une si longue marche.

Je vais ensuite faire les démarches pour récupérer ma Compostella et mon hébergement. Puis nous essayons de trouver un endroit où manger même si l’émotion me tord légèrement l’estomac.

Les jours suivants, je resterais à Santiago pour en profiter, pour m’imprégner, pour inscrire en moi toutes ces émotions, tous ces sentiments qui sont uniques et si précieux. J’y resterai 2 jours entier et j’aurai la chance de voir cette si belle ville sous le soleil.

Qui plus est, je retrouve des amis pèlerins rencontrés tout au long du chemin. La joie est immense de partager encore quelques minutes, heures, jours ensemble.

Bien que le premier jour, il m’ait été impossible d’écrire ou de partager cette expérience ; je prendrais ensuite le temps d’écrire des cartes postales à de nombreuses personnes. Ces heures passées à écrire mes petits mots me semblaient importantes. Certes, de façon décalée puisqu’ils ne les recevraient que d’ici quelques jours… Mais c’est ma façon à moi de communiquer. Et ça me laissait le temps de digérer mes propres émotions.

Après 2 jours d’arrêt à Santiago, je ressens le besoin de partir. Mon temps ici est passé et je suis heureuse d’avoir accepté d’y poser mon sac un jour de plus.

À moi le reste de l’aventure… Je repars donc vers Finisterre (le bout du monde) !

Petite info pratique et point historique :

Lorsque vous allez chercher votre Compostella, si vous êtes dans les 10 premiers pèlerins de la journée (il faut donc y aller tôt), le repas du midi vous est offert dans le restaurant le plus ancien et le plus chic de la ville.

C’est une tradition depuis 450 ans, cet établissement offre le repas aux 10 premiers pèlerins de la journée. Il se situe sur la place de la cathédrale et ce n’est autre que le Parador Hostal Dos Reis Catolicos.

Je n’ai pas eu la chance de faire partie de ceux-ci, mais je vous souhaite de le faire, ça semble super chouette.

Bilan de la neuvième semaine

1800 km parcourus, de nouveau à moins de 100 km de Santiago, presque la fin du détour, la galère sur la fin pour les étapes, toujours de la pluie, un peu beaucoup froid, c’est quand même beau la mer, retour en Galice, magnifique, fini les montagnes, physiquement HS, Camino Norte, tout proche de Santiago.

Comme ce détour était une bonne idée. Certes, je marche toujours sous la pluie, j’ai froid et les dénivelés sont usants. Mais l’expérience est belle, les paysages sont à couper le souffle et l’océan est majestueux. Qui plus est, j’avoue avoir besoin de ces 400 km de plus pour poser toutes mes réflexions et tous mes ressentis. 1600 km de marche ce n’est vraiment pas assez !

Je dois vous avouer qu’il m’aura fallu 1600 km, beaucoup d’heures sous la pluie et de nombreuses ampoules pour conclure qu’il faut s’équiper le mieux possible dès le début… Ce n’est pas un investissement en vain. Lorsque l’on subit la douleur des ampoules pendant des jours, on se rend compte de l’importance de bonnes chaussures. Une heure sous une pluie diluvienne est surmontable lorsque l’on a une bonne cape de pluie, des guêtres ou des vêtements en GoreTex ; alors que ça devient un calvaire sous (ou mal) équipé. Je sais, il m’en aura fallu du temps. Mais je ne l’oublierai plus. Je vous conseille de ne pas l’oublier non plus.

Je commence à me poser des questions sur l’après… Que faire de cette expérience ? Comment la partager ? Je dois continuer à marcher, c’est tout bonnement grandiose comme mode de vie.

Revenons au présent. Je ne me reconnais pas, je positive beaucoup, je ne suis plus stressée pour un sous, je laisse venir les choses… Je sais que je trouverai une solution à la moindre situation, serais-je de plus en plus sûre de moi ? La confiance en soi s’acquière avec le temps et les kilomètres, j’en suis la preuve vivante. L’autre point positif (et pas des moindres) : je n’ai plus de douleurs aux pieds. Quel bonheur, quelle chance.

Ce chemin, bien que très bitumé, me donne la chance de profiter du moindre rayon de soleil. Je m’imprègne de sa chaleur en attendant de le recroiser dans plusieurs heures (ou jours)… Je prends le temps, je profite du moindre instant, je ne précipite plus les choses ; je sais que ça me manquera dans quelques heures, jours, mois, années.

Je fais de plus en plus confiance au chemin (probablement aussi à moi). Je me dis qu’il faut apprendre de ses erreurs, continuer d’avancer et apprécier ce que la vie nous donne. C’est un parallèle assez facile à faire avec le Camino, mais pourtant, c’est vrai. Tu ne sais jamais ce qui t’attend derrière le virage : pluie, grêle, vent, soleil, montée, zone industrielle, magnifique village, chien fou, autoroute, descentes caillouteuses… Mais quoi qu’il en soit, tu marches vers ton objectif du jour, vers ton break, vers un esprit plus léger, plus libre… Le principal étant de rester positif et de continuer à avancer à son rythme, sans violence.

C’est tout de même étonnant tout ce que l’on apprend durant ces heures de marche, durant ces jours de réflexion, durant ces semaines de liberté.

C’est décidé, chaque jour est un anniversaire (l’entrée en Galice, mon 60e jour de marche, notre arrivée prochaine à Santiago…) / une fête ! Il faut les célébrer ainsi. Soyons conscient de la chance que nous avons et profitons.

Les dodos :

  • Le 11.11 – Soto de Luina / Albergue municipale (8€) – Dans une ancienne école, il y a fait relativement froid, pas possibilité de cuisiner, mais pas désagréable.
  • Le 12.11 – Luarca / Albergue Villa de Luarca (12€) – Pas de possibilité d’y cuisiner, ensemble plutôt récent mais il y a a fait froid.
  • Le 13.11 – La Caridad / Albergue la Xana (10€) – Endroit très agréable, proche du centre ville, récent et propre, pas possible de cuisiner.
  • Le 14.11 – Ribadeo / Hotel Rolle (15€) – Magnifique hôtel moderne, j’y ai eu enfin chaud et j’ai pu nettoyer mes affaires ! Le luxe !
  • Le 15.11 – Lourenza / Albergue municipale (8€) – Relativement grand hébergement, plutôt neuf, possibilité d’y cuisiner.
  • Le 16.11 – Gontan / Albergue municipale (8€) – Installations neuves, possibilité de cuisiner, grand dortoir mixe, il y a fait chaud, c’est le top.
  • Le 17.11 – Vilalba / Albergue As Pedreiras (10€) – Installations neuves, chauffé, possibilité de cuisiner, très agréable.